En plongeant dans les cassettes de Willy Oddó, musicien et chanteur du groupe mythique des Quilapayún, Frédérique Pressmann nous fait découvrir ces récits d'exil après le coup d'État de Pinochet au Chili. De Willy à Ismael Oddó, entre père et fils, une histoire de transmission.
Une Expérience signée Frédérique Pressmann, réalisée par Clémence Gross
avec la collaboration de l’Institut Français du Chili.
Au départ, il y a des images venues d’un autre temps : des hommes vêtus de longs ponchos noirs se tiennent debout sur scène, très droits. Les chansons qu’ils interprètent parlent de justice sociale, leurs mélodies raffinées sont ancrées dans la tradition andine. Ce sont les Quilapayún, groupe fondé à la fin des années 60 qui incarne l’essence de la nueva canción chilienne, à telle enseigne qu’il fut nommé ambassadeur culturel du Chili à l’étranger par le président Salvador Allende.
En septembre 1973, les “Quila” se trouvaient à Paris pour une série de concerts quand le coup d’État eut lieu et Allende fut renversé. C’est ainsi qu’ils eurent la vie sauve et que débuta pour eux une période radicalement nouvelle. À l’invitation du maire communiste de Colombes, les dix membres du groupe et leurs familles s’installèrent dans la ville, au sein d’une même tour. Là, ils durent se réinventer une vie, entre créativité musicale intense et douleur de l’exil.
Ismael Oddó est né de cet exil. Son père, Willy Oddó, est un des piliers du groupe. Ismael a grandi à cheval entre culture française banlieusarde et souvenirs d’un Chili révolutionnaire et fantasmé. Mais en octobre 1988, lorsque le pays se rouvre, Willy décide de rentrer au plus vite. Il quitte les Quilapayún, devenus immensément célèbres au niveau mondial, pour retrouver son pays et jouer un rôle actif dans sa reconstruction. Ismael suit ; il a 14 ans. Désormais, sa vie se déroulera de l’autre côté de l’Atlantique.
Il y a quelques années, la tante d’Ismael lui a remis une boîte contenant des cassettes : il s’agissait des lettres audio envoyées par Willy à ses proches pendant les 15 années de son exil français. Entretemps, Willy est mort et Ismael, devenu musicien, a repris sa place au sein des Quilapayún. Dans ces cassettes, des heures et des heures de témoignage dans lesquelles Willy relate son quotidien de musicien, ses joies de jeune père, la douleur d’être loin, la souffrance d’avoir vu son idéal politique renversé. À travers ces récits intimes, on retrouve en coupe tout un pan de notre histoire récente qui démarre avec une des plus belles expériences politiques des années 60 pour s’achever avec la création du premier régime néolibéral au monde. Une histoire qui passe aussi par la culture alternative du Paris des années 70-80, dans laquelle les réfugiés chiliens ont joué un rôle important. Et qui rejoint notre présent troublé ; dans les mouvements sociaux qui ces dernières années ont secoué le Chili comme de nombreux autres pays, un même chant revient qui incarne l’espoir de la victoire : c’est El pueblo unido jamás será vencido, chanson emblématique des Quilapayún devenue hymne planétaire.
En plongeant dans les cassettes de Willy, Frédérique Pressmann revisite cette histoire, sur le versant sensible, à travers le vécu de cette famille particulière. Une nouvelle correspondance audio de Paris à Santiago entre Ismael et Frédérique, menée avec les moyens technologiques d’aujourd’hui, vient éclairer et compléter les archives de Willy. À près de 50 ans de distance, par le miracle de la radio, Frédérique Pressmann recrée un dialogue entre le père et le fils. À eux deux, ils racontent une histoire de transformation et de désillusion, mais aussi de fidélité à soi-même et à ses idées. Une histoire d’amour, de lien et de transmission qui survit à la destruction et à la mort.
Pour en savoir plus
À découvrir :
- Travail artistique d’Ismael Oddó
- Histoire et répertoire des Quilapayún
- La ville métisse, à chaque coin de rue au Chili de Paola Stevenne
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Filmographie
Générique
Avec : Ismael Oddó
Et la voix de : Willy Oddó
Musique : Canción de la partida, extraite du disque Canciones Con mi viejo d’Ismael Oddó
Prise de son : Virginie Lorda et Johanna Gabric
ainsi que Francisco Fuenzalida à Santiago
Mixage : Claire Levasseur
Réalisation : Clémence Gross
Une création sonore de Frédérique Pressmann
Ce documentaire a reçu le soutien de l' Institut Français du Chili
Remerciements
Merci à Malika, Bruno, Andrés, Merle et Lucas.
Merci surtout à Ismael pour sa confiance.
L'équipe
- Production
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- Réalisation
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